Mon interpellation lors du Conseil Communal du 30 mars :
« Monsieur l’échevin Alexandre Pirson,
La déclaration de politique générale prévoit en page 15 de « Créer une commission vélo visant à associer les cyclistes à l’ensemble des décisions liées à la pratique du vélo ».
Je félicite votre prédécesseur et vous-même d’avoir tenu vos engagements en créant il y a deux ans cette commission vélo: c’est une excellente décision d’associer étroitement les cyclistes quotidiens aux décisions prises en matière de mobilité et de travaux publics.
Je m’interroge toutefois sur l’importance que vous accordez réellement au travail réalisé bénévolement et avec cœur par la dizaine de citoyens membres de cette commission vélo. Je souhaiterais en effet mettre en exergue deux dossiers abordés dans le cadre de la commission vélo : le placement d’arceaux et la rénovation de la rue du Bemel.
Concernant le placement d’arceaux, alors que 13 des 19 communes bruxelloises ont introduit en 2019 une demande de subsides pour développer le stationnement vélo sécurisé et non-sécurisé, bénéficiant en moyenne de 19.908 €/an de subside, la commune de Woluwe-Saint-Pierre s’est abstenue d’introduire un dossier.
Grâce notamment à ce subside, la commune d’Etterbeek a depuis lors développé son offre de stationnement vélo avec 750 arceaux supplémentaires qui représentent 1.500 places.
Ce n’est que très récemment que notre commune aurait finalement introduit une demande de subside pour installer … 24 arceaux à vélo sur tout Woluwe-Saint-Pierre. Ceci me paraît bien peu quand on sait que le subside pouvant être obtenu permettrait d’en installer plus d’une centaine par an et que la commission vélo a identifié, photos à l’appui – un sacré beau dossier qu’ils avaient préparé –, plus de 150 emplacements répartis sur le territoire communal.
Concernant la rénovation de la rue du Bemel, la commission vélo a formulé en février 2020 des propositions concrètes et détaillées d’aménagements de la voirie et des trottoirs visant à sécuriser les déplacements des piétons, des PMR et des cyclistes. Six mois plus tard, les trottoirs de la rue du Bemel ont été rénovés sans qu’aucune des propositions formulées par la commission vélo ne soit implémentée.
J’ai donc plusieurs questions pour vous reprises en trois points :
1. Pourriez-vous nous détailler les décisions concrètes qui ont été prises au cours des deux dernières années en suivant un avis formulé par cette commission vélo ?
2. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi la dernière commission vélo prévue par vidéo conférence le 17 mars de 17h à 18h30 a été annulée deux jours avant celle-ci ? Selon les informations communiquées aux membres de la commission vélo, vous deviez vous rendre en urgence en « voyage de coopération au développement en république démocratique du Congo ». Vouloir aider à digitaliser le recensement de la population dans cette province du Nord-Kivu est certes une cause louable mais cela nécessitait-il dans le contexte actuel un déplacement sur place en urgence? Pour rappel, vu le contexte sécuritaire difficile sur place, les voyages dans cette région du Congo sont actuellement strictement déconseillés par le Ministère des Affaires étrangères. Et, vu le contexte sanitaire en Belgique qui est très préoccupant, les voyages non-essentiels à l’étranger sont actuellement interdits au commun des mortels.
Alors, quels sont les résultats concrets et qui n’auraient pu être atteints avec une vidéoconférence?
Même à supposer que ce voyage était vraiment essentiel et urgent, vous était-il à ce point impossible de rejoindre cette commission vélo du 17 mars, qui était organisée par vidéoconférence, à 17h?
3. J’aimerais en savoir un peu plus sur le déroulement de votre voyage au Congo.
Qui a organisé ce voyage ? Est-ce que la commune a supporté une partie du coût de ce voyage?
Concernant la rencontre avec le gouverneur du Nord-Kivu, qui sont les deux autres personnes qui vous ont accompagné ? S’agissait-il bien de deux avocats d’affaires? Comment ces deux autres personnes ont-elles été présentées au gouverneur? Ces deux autres personnes étaient-elles mandatées par la commune ? Pourriez-vous nous rassurer sur le fait qu’après avoir discuté de l’aide que la commune allait apporter dans le cadre de ce jumelage, aucun autre sujet n’a été évoqué dans le cadre de cette réunion avec le gouverneur?
Enfin, concernant le contexte sanitaire, il ressort de photos publiées sur internet que les règles de distanciation sociale (notamment le port du masque en intérieur alors qu’il est obligatoire en RDC ) n’ont pas été respectées ? Pourquoi cela n’a-t-il pas été possible? N’est-ce pas le rôle des politiciens de montrer le bon exemple ?
J’espère que vous saurez nous rassurer.
D’avance je vous remercie pour vos réponses »
Tanguy Verheyen (OpenMR) est ensuite intervenu pour constater que :
« dans le cadre de ce type de voyage, l’échevin de la coopération et des jumelages ainsi qu’au moins un fonctionnaire faisaient dans le passé le déplacement : ceci ne semble pas avoir été le cas ici. » De plus, Tanguy Verheyen a également exprimé ses interrogations sur la durée du séjour sur place ainsi que sur l’identité des personnes qui accompagnaient l’échevin Pirson sur place : « quand on explique qu’il y avait deux jours sur place pour des visites de projets pour la représentation de la commune sur un voyage de plus de deux semaines, on peut se demander mais quel était l’objet du voyage dans le fond avec vos amis, vos relations d’affaires, vos connaissances, je ne sais pas vous clarifierez vous-même ? Deux de ces 15 jours sur place peuvent avoir une vocation humanitaire mais quelle était la vocation de l’ensemble du voyage ? »
Jonathan De Patoul (Défi) est ensuite intervenu pour souligner que :
le projet que la commune mène à Goma est « un projet important d’un million d’euros sur deux ans (…) c’est un projet de bonne gouvernance donc il faut être attentif à être les plus professionnels possible, rigoureux et sérieux et avoir une bonne connaissance et compréhension de la République Démocratique du Congo. Et très sincèrement, pour avoir travaillé plus de 7 ans en coopération au développement (…) sur le terrain dans ces pays-là (…) il convient de faire attention à l’image que l’on renvoie (…) l’image n’est ici pas très positive et j’espère que l’échevin va pouvoir nous rassurer car j’ai peur que cela puisse mettre à mal le travail qui a été effectué depuis de nombreuses années. Donc je me permets de m’en inquiéter. »
Alexandre Pirson a ensuite longuement répondu :
en ne donnant toutefois aucun exemple concret de projet qui a été réalisé au cours des deux dernières années en suivant un avis formulé par cette commission vélo.
Concernant mon exemple des arceaux à vélos, il a précisé que l’obtention du nouveau subside demandait du temps car il fallait remplir une fiche technique individuelle par arceau. Seuls 24arceaux ont ainsi fait l’objet d’une demande de subside, la commune préférant financer 150 arceaux supplémentaires sur fonds propres, sans bénéficier d’un quelconque subside. L’échevin a ensuite expliqué que suite à la démission de la conseillère en mobilité au sein de l’administration communale et à l’arrivée du Covid-19, les réunions de commissions vélos avaient été reportées. Son but était dorénavant d’organiser une réunion par quartier (en commençant par Stockel) et une réunion plénière trimestriellement pour discuter de divers aménagements urbains. Cette réunion était donc prévue le 17 mars. A propos de cette réunion, l’échevin a précisé que « le conseiller en mobilité m’avait dit qu’il s’occuperait d’animer cette réunion donc pas de soucis. Une semaine avant cette réunion mon collaborateur me contacte pour m’annoncer que notre conseiller en mobilité croule sous le travail et demande de reporter la réunion à début avril. Je peux comprendre cela et donc un email a été envoyé, un peu tard, j’en conviens. (…) il a inclut un contre-rendu détaillé de toutes les réponses qui devaient être communiqué aux membres. »
Concernant son voyage au Congo, l’échevin estime que la création d’un climat de confiance ne « se fait pas se faire par Zoom (…) Le Covid ne doit pas nous empêcher d’avancer sur ce projet ». « Par rapport au port du masque, vous avez tout à fait raison (…) c’est dommageable tant pour le programme que pour moi, je vous l’accorde. Pour les dépenses, cela va être assez clair car j’ai financé entièrement mon voyage à 100%.»
« Le gros enjeu de notre projet c’est aussi du juridique et du numérique et donc ces (deux) personnes (qui m’accompagnaient) avaient ces compétences là et ces personnes-là m’ont accompagné gentiment lors de la première visite d’introduction avec le gouverneur car c’était la première de la semaine. Par la suite, sur toutes les autres réunions de la semaine que j’ai entrepris ils n’étaient pas là à part sur une réunion sur le numérique (…) où ils ont bénévolement passé leur temps pour la commune de Woluwe-Saint-Pierre ».
« Ce n’était pas deux jours comme l’affirme Tanguy Verheyen : la moitié de mon séjour a été occupé par la commune. Il y a un rapport de mon séjour. L’autre moitié a été occupée par des projets humanitaires ».
Tout en relativisant la gravité du problème soulevé, Aymeric De Lamotte (indépendant) est ensuite intervenu pour notamment relever :
« deux trois attitudes peut-être maladroites et déplacées de la part de Mr. Pirson. Par exemple le fait d’avoir introduit des personnes tierces, des amis à lui, dans une réunion officielle avec le gouverneur alors qu’il portait sa casquette d’homme politique. On peut lui reprocher d’avoir pris un peu de bon temps non-essentiel au bout du monde en pleine pandémie à côté de ses missions politiques (…) »
Le bourgmestre a ensuite confirmé que :
« c’est assez rare que (…) lorsque un échevin représente au moins pour une partie de son séjour la commune et prend toute une série de contacts, qu’aucun de ses frais n’aient été imputés à la commune. Cela ne nécessitait donc pas de décision du collège même si nous étions parfaitement au courant, Mr.Van Breugel et moi-même avons pris notre plume pour écrire au maire et au gouverneur pour annoncer la venue de Mr. Pirson (…)».
« Ces gens ne sont plus avocats d’affaires et ils y allaient dans un cadre strictement humanitaire ».
« D’après ce que j’ai pu comprendre, notre échevin des jumelages et une délégation de la commune se rendra sur place à la fin du premier semestre au plus tard pour continuer les contacts et le développement des projets ».
J’ai ensuite répliqué que (en étant interrompue à plusieurs reprises de manière très agressive par le bourgmestre) :
« Concernant votre réunion avec le gouverneur du Nord-Kivu, Mr. l’échevin, malgré vos explications, je vous avoue ne pas comprendre pourquoi ce choix : pourquoi ces deux avocats d’affaire vous ont suivi jusque dans le bureau de ce haut représentant Congolais, qui est pour rappel l’équivalent du premier Ministre ici en Belgique, cette province est quand même deux fois plus grande que la Belgique. Assez naïvement, je m’attendais plutôt à vous y voir accompagné par un informaticien ou un haut fonctionnaire de l’Etat civil ou du cadastre de WSP … mais vraiment pas des gens qui ont ce genre de formation d’avocats d’affaire même si c’est dans le cadre d’une aide humanitaire …. »
Par ailleurs, j’ai l’impression qu’il y a actuellement à WSP beaucoup de dossiers en souffrance sur votre bureau. On a parlé de plusieurs dossiers en matière d’urbanisme en début de soirée, je ne vais plus m’attarder sur ces dossiers. En matière de mobilité, je pense par exemple aux limites de vitesse sur les axes Orban/Parmentier, à la piste cyclable de l’avenue de Tervuren ou encore au suivi des avis de votre Commission vélo donc voilà, il me semble que vous avez un emploi du temps assez chargé et je trouve cela un peu dommage qu’un voyage ne vous a pas permis de participer à cette vidéoconférence avec la commission vélo.
Vous m’aviez répondu lors d’une de mes précédente question écrite que, je cite « Nous partageons vos préoccupations ainsi que celles des citoyen(nes) et vous rejoignons dans l’idée que le/la cycliste mérite mieux à Woluwe-Saint-Pierre. ». Dans le cadre de cette commission vélo, vous avez la chance d’avoir à votre disposition une dizaine de citoyens ayant une connaissance pratique du terrain et dont certains ont une compétence technique qui ne doit plus être démontrée. Cette ressource est disponible bénévolement pour la commune. Vous ne semblez vraiment pas leur accorder l’importance qu’ils méritent. Et ça, c’est démotivant pour eux !
A l’avenir, je vous invite donc vraiment à aligner vos paroles et vos actes et à concentrer toute votre énergie en premier lieu sur le traitement de vos dossiers et à ne pas vous égarer dans les dossiers de vos collègues du Collège, même si ce sont des causes très louables que je ne remets pas ça en cause.
Plus spécifiquement, ici, je vous invite à suivre activement les travaux de la commission vélo! C’était ça vraiment le point de départ de mon interpellation.
Enfin, Monsieur l’échevin, en cette période de pandémie, et je suis contente que vous l’ayez dit, je pense que c’est important d’être solidaire avec nos concitoyens en portant le masque à l’intérieur et en limitant nos déplacements à l’étranger.
Tanguy Verheyen (OpenMR) a clôturé la discussion :
en rappelant son « malaise par rapport à la pression qui est mise assez fortement sur Mme. Vaessen (…). Je n’ai pas eu de réponse à toutes les questions. On a découvert cette histoire assez complexe par presse interposée,mais je remarque qu’il reste de nombreuses zones d’ombres. Pourquoi est-ce qu’on parle de trois jours de voyage humanitaire dans la presse ? Pourquoi est-ce que lors de la réunion de l’asbl des jumelages et partenariats il a été dit que c’était deux jours de la représentation de la commune ? Pourquoi est-ce qu’il y a des amis dans le bureau alors qu’il y a également ici à l’administration communale des gens compétents qui peuvent accompagner avec les compétences que vous recherchez ? Pourquoi est-ce que l’échevin des jumelages et de la coopération n’est pas présent sur place alors que ça a toujours été le cas ? Pourquoi est-ce que la commune a refusé d’envoyer un haut fonctionnaire si c’était si important comme mission ? Pourquoi est-ce que Jonathan De Patoul a même dit qu’il avait peur que notre réputation et le projet ait été mis à mal par ce déplacement ? Pourquoi ce faisceau de questions qui restent sans réponse ? (…) Il est raisonnable de se dire qu’il y a un certain flou qui encadre votre action ici, sans compter que l’échevin des jumelages et de la coopération se déplacera au Congo dans 2-3 mois. Mais alors où était l’urgence ? »
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Même salle de réunion, mais ambiance « masquée » pour ces deux réunions de travail locales… comme quoi… :
La presse en parle :
Lien vers l’article de BX1 : Woluwe-Saint-Pierre : le voyage au Congo d’un échevin dans le contexte sanitaire suscite des questions
Lien vers l’article de la DH : Polémique autour du voyage d’un échevin de Woluwe-Saint-Pierre au Congo…